Pour la première fois depuis des années, je passe du temps dans un endroit où le changement entre les saisons est très distinct. Le Québec, avec ses hivers froids et beaucoup de neige, puis le printemps, où les arbres ont une nouvelle croissance au vert éclatant, nous offrant un nouveau paysage bien apprécié après un hiver rigoureux. Puis évidemment, on savoure encore plus l’été, sachant qu’il est toujours trop court. Les Québécois feront tout leur possible pour profiter d’une journée ensoleillée à l’extérieur… car ils savent que cela ne durera pas très longtemps! Puis, souvent trop tôt, l’automne se présente et, bien qu’il se présente en beauté avec un amalgame de couleurs, on sait très bien que l’hiver froid approche à grands pas et que les journées se feront plus courtes.
Lorsque je suis déménagée en Californie, j’avais l’impression qu’il n’y avait pas de saisons. J’étais tellement habituée aux grands changements quatre fois par année que je ne remarquais pas vraiment les subtilités des saisons californiennes. Mon observation se concentrait surtout sur les plus grands changements qui étaient plus évidents. D’année en année, j’ai appris à faire plus de distinctions entre les saisons dans mon nouveau lieu de résidence. J’ai commencé à remarquer plus de nuances; que le citronnier derrière ma maison aurait non pas une, mais deux récoltes par an et parfois trois, ce qui, pour une Canadienne, est assez phénoménal! J’ai remarqué que, malgré le fait qu’il y avait des fleurs et des fruits frais tout le temps, cela aussi faisait partie des saisons où différentes variétés apparaissaient à des moments différents.
C’est ce que j’enseigne à travers le mouvement. C’est ainsi que nous remarquons plus de nuances lorsque nous apprenons à mieux nous connaître. Nous apprenons à reconnaître les subtilités du moi intérieur, la précision d’un mouvement, d’une articulation ou une meilleure distinction de nos états émotionnels, plutôt que d’étiqueter simplement les extrêmes. Notre palette de couleurs, nos mots deviennent plus descriptifs, notre répertoire s’élargit. Nous apprivoisons la complexité de l’être humain dans son entièreté — corps et esprit. C’est en portant attention que l’on apprend à faire plus de distinctions et c’est avec l’observation des différences que l’on approfondit notre apprentissage. Tout comme en observant la lumière à différents moments de la journée et à une autre période de l’année, le type de glace ou de neige, le type de vin que vous buvez ou le modèle de vélo que vous préférez.
Quel que soit votre passion, votre passe-temps, votre métier ou votre carrière, vous remarquez plus de spécificités dans vos connaissances et vous pouvez remarquer des dissimilitudes qu’un nouveau venu ou un novice ne pourrait pas voir. Et plus vous apprenez, plus vous vous spécialisez. Il en va de même avec le moi, avec notre état d’esprit et avec le mouvement.
Tout d’abord, nous remarquons la différence que dans les contrastes extrêmes et, plus nous y prêtons attention, plus nous affinons notre compréhension et nos connaissances afin de devenir plus astucieux pour remarquer les subtilités, afin d’avoir plus de précision dans ce que nous faisons, ce que nous sommes, ce que nous contemplons. Bien sûr, tout le monde ne veut pas investir le temps pour raffiner son sens de l’observation ou apporter plus de finesse à ses mouvements. Cependant, comme nous n’avons qu’un seul corps tout au long de notre vie et que nous vivons en son sein quoi qu’il arrive, autant en faire une expérience agréable. De plus, mieux comprendre ses saisons ou sautes d’humeur nous permet d’être mieux équipé pour s’ajuster, s’adapter et aller de l’avant avec aisance, efficacité et confiance en soi.
Crédits photo: Mélanie Julien