J’ai grandi avec peu d’outils pour explorer les options qui s’offraient à moi. À mes yeux, il n’y avait que le noir ou le blanc. Je n’avais pas vraiment conscience des nombreuses nuances qui existaient entre ces deux extrêmes, ce qui a entraîné un manque de choix, je dirais même de liberté. J’ai pourtant vécu une jeunesse privilégiée où j’étais libre comme l’air. Mais je ne savais pas comment modérer mes ardeurs. Je me donnais toujours à 100 %, jusqu’à ce que je sois au bout du rouleau et qu’un repos s’impose. Puis, une fois mes piles rechargées, je recommençais le même manège.
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours étudié le mouvement et la danse sous l’angle de la qualité et de l’intensité. La méthode Feldenkrais(TM) a changé ma façon de voir le monde. Elle m’a ouvert la porte à une foule d’options et à une plus grande liberté, non seulement physique, mais aussi mentale.
Que j’enseigne le Pilates, la méthode FeldenkraisMD®, la danse ou quoi que ce soit d’autre, j’invite toujours les élèves à se questionner sur ce qu’ils font et à explorer un grand nombre d’options. De cette manière, ils se sentent plus impliqués dans leur démarche de transformation (qu’il s’agisse de réadaptation, d’image de soi, de comportement ou de posture) et ils prennent davantage leur bien-être en main.
La règle de trois:
Dans le cours de « Prise de conscience par le mouvementMD », je suggère souvent aux gens d’essayer trois variantes d’une posture ou d’un mouvement. Imaginons que vous êtes allongé(e) sur le dos et que je vous demande de plier les genoux et de poser les pieds au sol. Sentez-vous que vous êtes dans une posture efficace et confortable du premier coup? Ou pourriez-vous dépenser moins d’énergie en déplaçant vos pieds? Très souvent, on ne se questionne pas et on déploie trop d’efforts pour maintenir une posture qui n’est pas optimale.
Pourquoi ce simple détail est-il important? Parce qu’il s’applique aussi à la manière dont on vit. S’ancrer dans ses habitudes sans rien remettre en question, c’est gaspiller de l’énergie qu’on pourrait utiliser plus efficacement. Il n’y a rien comme apprendre à se connaître pour faire de meilleurs choix. Il est donc utile d’appliquer le principe des trois variantes à tout ce qu’on fait, même lorsqu’on pense avoir atteint la perfection. On peut toujours faire mieux.
Je vous propose donc d’essayer trois petites variantes la prochaine fois que vous poserez un geste qui vous est familier (comme plier les genoux lorsque vous êtes allongé(e) sur le dos ou vous asseoir devant l’ordinateur). D’abord, prenez note de ce que vous avez choisi d’emblée. Puis, essayez deux autres options, par exemple : les pieds rapprochés et les pieds éloignés. Qu’est-ce qui est le plus confortable? Votre réponse ne devrait pas venir des autres ni de vos idées préconçues, mais bien de ce que vous ressentez et de vos besoins. En somme, elle doit venir de votre sens kinesthésique. Faites confiance à l’intelligence de votre système nerveux. Laissez cette démarche stimuler votre curiosité et votre désir d’explorer afin de prendre conscience de vos habitudes, d’élargir le champ des possibles et de faire des choix plus éclairés.
Confort familier ou confort efficace?
Si on n’a que deux options, il est difficile de déterminer si la plus confortable est celle qui nous est familière ou celle qui est la plus efficace. Aussi, si on ne peut choisir qu’entre A ou B, il y a peu de place à la nuance et on peut facilement tomber dans la perspective du « bien ou mal ». Toutefois, l’ajout d’une troisième option réduit la sensation d’être coincé entre deux choix. Prendre conscience de la gamme d’options qui existent entre A et B stimule la curiosité et nous mène au-delà de la vision binaire, qui s’applique bien mal à la complexité de l’humain et de la nature. Cette démarche nous aide à développer un esprit critique et à naviguer avec confiance dans la mer de décisions que nous pouvons prendre.
Il est dans la nature même de l’humain d’économiser son énergie, de bouger efficacement et de se protéger des blessures ou de la douleur. Pour ce faire, on choisit souvent de s’en tenir à ce qu’on connaît ou à ce qui a toujours fonctionné, ce qui peut entraîner l’adoption de comportements ou d’habitudes néfastes. Les limites qu’on se crée ainsi sont un frein à l’épanouissement. Être réellement attentif à ses besoins, sans idée préconçue, est la clé pour se sentir connecté à son corps tout entier.
En vous assoyant la prochaine fois, essayez trois variantes. Par exemple, transférez votre poids un peu plus à gauche ou à droite, vers l’avant ou vers l’arrière. Et surtout, réjouissez-vous de pouvoir explorer différentes options. Vous êtes libre de choisir comment vous bougez : l’intensité, l’effort, la vitesse… toutes les variables vous appartiennent.
Puis-je apprendre, grâce au mouvement, à être un(e) meilleur(e) citoyen(ne) en faisant preuve de curiosité et en prenant part aux conversations difficiles avec grâce? Puis-je aller au-delà de la rage et des réactions explosives en observant les effets de ces attitudes sur la manière dont je m’assois ou dont je respire? Ce travail d’introspection peut être intimidant; assumer son pouvoir de décision et la responsabilité de son bien-être, ce n’est pas rien! Mais on peut aussi en tirer une plus grande confiance en soi lorsqu’on réalise qu’on tient la clé d’un meilleur avenir – à tout le moins, en ce qui concerne les éléments que l’on contrôle.
Merci d’avoir choisi de me lire jusqu’à la fin.
Healthy Wishes for Your Body and Mind,
Christine
Crédits photo: Oda Aase Johnsen